Des documents inédits sur les Tramways de la Sarthe

Les Archives départementales viennent d’acquérir un ensemble inconnu de documents propres à l’existence des tramways de la Sarthe (1883-1947). Reste désormais à en exploiter le contenu.

« Le Maine-Libre » : Quelle est la nature de ce fonds ?
Samuel Gibiat, Directeur des Archives :
Il s’agit d’un ensemble d’archives familiales et d’entreprise réunies par Charles-Paul Dorizon, (né à Paris le 2 août 1861), directeur de la Compagnie des Tramways de la Sarthe (des années 1930 à sa dissolution en 1947). Cette compagnie chargée de l’exploitation des lignes du plan Freycinet (second désenclavement ferroviaire d’intérêt local) a été créée conformément aux statuts de 1883. Ces documents étaient conservés « dans leur jus », au domicile familial de la rue Chanzy au Mans. Les documents les plus anciens remontent à 1886, les plus récents datent de 1963, époque de la liquidation des derniers avoirs de la compagnie. La période du Front Populaire (1936-1939) semble la plus densément représentée.

De quoi est composé ce fonds ?
L’ensemble est composé d’archives en liasses, registres, tirages photographiques, procès-verbaux des conseils d’administration (12 volumes), correspondances, plans techniques, coupures de presse, illustration de matériels ferroviaires en situation avec le personnel, des dessins de gares, des photos d’accidents (comme celui de Dehault) ou de destruction (les bombardements de la guerre)… dans un très bon état de conservation… bien que très empoussiéré !

C’est une acquisition originale autant que rare ?
Notre rôle est la collecte réglementaire des archives publiques produites par les administrations et collectivités du département. Il n’empêche, les Archives départementales s’inscrivent dans une politique volontariste d’acquisition d’archives d’origine du privé. Ce qui est fragile. Rien n’oblige à ce qu’elles soient conservées ni transmises à des institutions spécialisées en vue de leur sauvegarde et valorisation.

Samuel Gibiat : « L’acquisition de fonds privés est exceptionnelle qui concerne le patrimoine local ».
Photo de Hervé Petitbon

Mais il s’agit d’une acquisition nécessaire ?
En une époque où la mondialisation tend à gommer les spécificités identitaires locales, la sauvegarde du patrimoine sous toutes ses formes est un véritable enjeu de civilisation plus encore que de mémoire. C’est dire tout l’intérêt que nous apportons à l’acquisition d’archives privées.

Quand le public pourra-t-il y accéder ?
Nous présenterons ce fonds au cours d’une exposition avec les Archives historiques de la SNCF, qui sera présentée en juin 2013.

En même temps nous pouvons espérer que le sujet tentera un universitaire, un étudiant pour son exploitation, ce qui serait complètement original dans la mesure où les documents apparaissent pour la première fois.

Propos recueillis par Jacques Guichard
Article du Maine-Libre du 16 juillet 2012

Œuvres du dessinateur parisien, mais sarthois d’adoption, Pierre Delarue-Nouvellière

Le pont en X du Mans. © Delarue-Nouvellière, 1970

Tramways de la Sarthe – Manœuvre en gare de Coulans. ©Delarue-Nouvellière, 1972.

Le voilà, notre cher Souvenir ! à la « d’vallée » au passage à niveau ( !) vicipal de la Devaisière. Il est parti du mans, gare Nougat, sur le coup de cinq heures, il arrive fumant à Coulans. ©Delarue-Nouvellière pour 1967.

Il vit toujours dans le cœur de ceux qui l’ont connu et aimé. ©Delarue-Nouvellière

Passage à niveau proche de la gare de Trangé-Chauffour, avec l’expression de mes sentiments cordiaux. ©Delarue-Nouvellière.

Une délégation officielle du conseil général examine une automotrice des Tramways de la Sarthe

Sur l’initiative du Conseil général et de l’Administration départementale, la Compagnie des Tramways de la Sarthe a déjà mis en service trois automotrices rapides et confortables qui répondent aux vœux des usagers : deux machines « de Dion », à essence, et une « Saurer-Diesel », à huile lourde, et une quatrième doit bientôt être acquise.

Gare centrale des Tramways de la Sarthe au Mans

La Société centrale de chemins de fer et d’entreprises, dont le siège est au Mans, fabrique dans ses usines de Prix-Lès-Mézières (Ardennes) un genre d’automotrices à voile métrique. Une de ces machines a été commandée par la Compagnie des chemins de fer du Morbihan.

M. Verney, administrateur délégué de la Société, a voulu profiter du passage de la voiture dont la livraison s’effectue ces jours-ci, à peu de distance du département de la Sarthe, pour présenter le modèle aux services intéressés.

Aimablement invité à assister aux démonstrations, nous nous sommes joints hier matin, à 8 h 30, au groupe de personnalités qui, place de la Préfecture, prit place dans un autobus de la S.T.A.O. pour se rendre à Loué, où l’automotrice était garée, les essais devant avoir lieu entre cette dernière ville et Le Mans.

La nouvelle voiture est d’un aspect très engageant avec sa caisse peinte en vert et crème. L’intérieur s’inspire heureusement de la ligne moderne. Les fauteuils spacieux et confortables à souhait, sont groupés deux à deux face à la route, avec passage au milieu. À l’avant, le poste de pilotage est isolé du public, et à l’arrière se trouve aménagé une sorte de petit compartiment à bagages, muni également de strapontins en cas d’influence de voyageurs, en tout 26 fauteuils, deux se trouvant adossés au poste de pilotage et 8 strapontins.

M. Verney fait un rapide exposé des caractéristiques du modèle : hors tampons 9m55 ; de la caisse 8m75 ; de l’emplacement utilisable 7m35 ; hauteur du plancher au-dessus des rails 0m85 ; hauteur intérieur de la caisse 2m10 ; largeur extérieur 2m30 ; empattement 4m30 ; poids à vide 7 tonnes 5 ; en charge environ 11 tonnes ; vitesse maximum 55 kilomètre-heure pouvant être portée à la demande à 70 et 80 kilomètres.

Le moteur est un Diesel-Panhard, 6 cylindres, sans soupapes de 8 litres 900 de cylindrée, d’une puissance maximum de 105 CV. Il consomme de l’huile lourde, 18 litres environ aux 100 kilomètres, et 22 litres avec la traction supplémentaire d’un wagon de 10 tonnes.

Le freinage comprend un frein à pédale agissant sur les quatre roues, un frein à main agissant sur les roues motrices, un frein électromagnétique sur rails et une pompe à vide dans une conduite étanche pour le freinage de la remorque.

Le chauffage est assuré par une tuyauterie où passent les gaz d’échappement.

Et le tout se complète d’un vérin de retournement breveté qui permet l’en […] l’ensemble de prendre une direction diamétralement opposée sans avoir recours aux plaques tournantes.

La voiture automotrice soulevée hors des rails par le vérin, prête à pivoter. On distingue, le frein électromagnétique entre les roues arrière et le vérin lui-même.

Nous prenons place à l’intérieur, et l’automotrice qui démarre doucement, franchit comme en jouant, l’obstacle que présente une courbe très prononcée de la voie. Puis, prenant de la vitesse, elle s’arrête sans heurt, sur un signe de M. Verney, les freins agissent sur une vingtaine de mètres. À la petite station de Vallon-sur-Gée, nouvel essai concluant de freinage, à vide, malgré la voie, très « grasse » par suite du brouillard, le frein électromagnétique agissant effectivement sur le rail lui-même.

L’intérieur du véhicule

Puis dans une tenue de marche excellente, l’automotrice arrive au Mans vers 10h45, où à la gare centrale des tramways on procède au « retournement » de la machine. Après que deux madriers eurent été glissés sous le vérin pour servir de points d’appui, le moteur fonctionnant, la voiture se soulève au-dessus des rails, il ne reste plus qu’à la faire pivoter et le véhicule après avoir opéré un demi-tour sur lui-même est replacé de la même façon sur la voie.

Toues les personnes présentes, parmi lesquelles M. Claudon, le distingué ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, MM. Monchâtre, d’Aillières, Soury, Begland, docteur Pottier, Chapin, conseillers généraux, MM. De l’Escale, ingénieur en chef adjoint de l’exploitation des chemins de fer de l’Etat ; Fronteau directeur de la Compagnie des tramways à vapeur ; Duroy, ancien inspecteur ; Conin, chef de dépôt ; Hiret, président de la Chambre de commerce ; Pellier, vice-président de la S.T.A.O. ; Garczinski, Barillet, Groult, Cornely, directeur de la S.T.A.O., etc., ont été très intéressés par ces démonstrations et furent unanimes pour complimenter MM. Verney père et fils, pour la présentation parfaite de cette nouvelle automotrice.

Ajoutons pour être complet qu’un vin d’honneur fut offert par M. Verney à l’intérieur même de la voiture, ce qui ne manquait pas, avouons-le, de piquant et d’originalité.

L’automotrice Diesel a maintenant regagné Laval, par la voie étroite, puis hissée sur un wagon spécial, elle a été dirigée sur Vannes où elle doit arriver dans la journée de demain.

Article du journal La Sarthe du 13 février 1934