Une délégation officielle du conseil général examine une automotrice des Tramways de la Sarthe

Sur l’initiative du Conseil général et de l’Administration départementale, la Compagnie des Tramways de la Sarthe a déjà mis en service trois automotrices rapides et confortables qui répondent aux vœux des usagers : deux machines « de Dion », à essence, et une « Saurer-Diesel », à huile lourde, et une quatrième doit bientôt être acquise.

Gare centrale des Tramways de la Sarthe au Mans

La Société centrale de chemins de fer et d’entreprises, dont le siège est au Mans, fabrique dans ses usines de Prix-Lès-Mézières (Ardennes) un genre d’automotrices à voile métrique. Une de ces machines a été commandée par la Compagnie des chemins de fer du Morbihan.

M. Verney, administrateur délégué de la Société, a voulu profiter du passage de la voiture dont la livraison s’effectue ces jours-ci, à peu de distance du département de la Sarthe, pour présenter le modèle aux services intéressés.

Aimablement invité à assister aux démonstrations, nous nous sommes joints hier matin, à 8 h 30, au groupe de personnalités qui, place de la Préfecture, prit place dans un autobus de la S.T.A.O. pour se rendre à Loué, où l’automotrice était garée, les essais devant avoir lieu entre cette dernière ville et Le Mans.

La nouvelle voiture est d’un aspect très engageant avec sa caisse peinte en vert et crème. L’intérieur s’inspire heureusement de la ligne moderne. Les fauteuils spacieux et confortables à souhait, sont groupés deux à deux face à la route, avec passage au milieu. À l’avant, le poste de pilotage est isolé du public, et à l’arrière se trouve aménagé une sorte de petit compartiment à bagages, muni également de strapontins en cas d’influence de voyageurs, en tout 26 fauteuils, deux se trouvant adossés au poste de pilotage et 8 strapontins.

M. Verney fait un rapide exposé des caractéristiques du modèle : hors tampons 9m55 ; de la caisse 8m75 ; de l’emplacement utilisable 7m35 ; hauteur du plancher au-dessus des rails 0m85 ; hauteur intérieur de la caisse 2m10 ; largeur extérieur 2m30 ; empattement 4m30 ; poids à vide 7 tonnes 5 ; en charge environ 11 tonnes ; vitesse maximum 55 kilomètre-heure pouvant être portée à la demande à 70 et 80 kilomètres.

Le moteur est un Diesel-Panhard, 6 cylindres, sans soupapes de 8 litres 900 de cylindrée, d’une puissance maximum de 105 CV. Il consomme de l’huile lourde, 18 litres environ aux 100 kilomètres, et 22 litres avec la traction supplémentaire d’un wagon de 10 tonnes.

Le freinage comprend un frein à pédale agissant sur les quatre roues, un frein à main agissant sur les roues motrices, un frein électromagnétique sur rails et une pompe à vide dans une conduite étanche pour le freinage de la remorque.

Le chauffage est assuré par une tuyauterie où passent les gaz d’échappement.

Et le tout se complète d’un vérin de retournement breveté qui permet l’en […] l’ensemble de prendre une direction diamétralement opposée sans avoir recours aux plaques tournantes.

La voiture automotrice soulevée hors des rails par le vérin, prête à pivoter. On distingue, le frein électromagnétique entre les roues arrière et le vérin lui-même.

Nous prenons place à l’intérieur, et l’automotrice qui démarre doucement, franchit comme en jouant, l’obstacle que présente une courbe très prononcée de la voie. Puis, prenant de la vitesse, elle s’arrête sans heurt, sur un signe de M. Verney, les freins agissent sur une vingtaine de mètres. À la petite station de Vallon-sur-Gée, nouvel essai concluant de freinage, à vide, malgré la voie, très « grasse » par suite du brouillard, le frein électromagnétique agissant effectivement sur le rail lui-même.

L’intérieur du véhicule

Puis dans une tenue de marche excellente, l’automotrice arrive au Mans vers 10h45, où à la gare centrale des tramways on procède au « retournement » de la machine. Après que deux madriers eurent été glissés sous le vérin pour servir de points d’appui, le moteur fonctionnant, la voiture se soulève au-dessus des rails, il ne reste plus qu’à la faire pivoter et le véhicule après avoir opéré un demi-tour sur lui-même est replacé de la même façon sur la voie.

Toues les personnes présentes, parmi lesquelles M. Claudon, le distingué ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, MM. Monchâtre, d’Aillières, Soury, Begland, docteur Pottier, Chapin, conseillers généraux, MM. De l’Escale, ingénieur en chef adjoint de l’exploitation des chemins de fer de l’Etat ; Fronteau directeur de la Compagnie des tramways à vapeur ; Duroy, ancien inspecteur ; Conin, chef de dépôt ; Hiret, président de la Chambre de commerce ; Pellier, vice-président de la S.T.A.O. ; Garczinski, Barillet, Groult, Cornely, directeur de la S.T.A.O., etc., ont été très intéressés par ces démonstrations et furent unanimes pour complimenter MM. Verney père et fils, pour la présentation parfaite de cette nouvelle automotrice.

Ajoutons pour être complet qu’un vin d’honneur fut offert par M. Verney à l’intérieur même de la voiture, ce qui ne manquait pas, avouons-le, de piquant et d’originalité.

L’automotrice Diesel a maintenant regagné Laval, par la voie étroite, puis hissée sur un wagon spécial, elle a été dirigée sur Vannes où elle doit arriver dans la journée de demain.

Article du journal La Sarthe du 13 février 1934